vendredi 20 septembre 2013

La sous-traitance du point de vue sociologique.

Jean Dupré définit la sous-traitance en la liant au concept de prestation. Le prestataire est pris dans une contrainte où il ne peut brandir des droits pour limiter, par exemple, la durée de son travail à la durée légale ou maximum autorisée. Pour que l'entreprise qui l'emploie perdure et garde son client, le travailleur en contrat à durée indéterminée a le sentiment d'avoir quelque responsabilité et quelque pouvoir en remplissant parfois, dans des conditions extrêmes, une mission. Il se sent le pouvoir de « sauver l 'entreprise » en prenant sur son temps de vie, comme un patron « sauve » la sienne en licenciant une partie de ses effectifs. Ce pouvoir qu'il s'accorde lui permet de légitimer non seulement la restriction de sa liberté mais aussi de celle des autres au nom d'un esprit d'équipe. Le travail prime sur l'intérêt personnel, et cet esprit d'équipe est là pour le rappeler. On craint que la prestation revienne à une entreprise concurrente, ceci impliquant le renvoi de la sienne et des changements de situation angoissants. La prestation de service signifie la mise à disposition de personnel qui ne peut, pour honorer le contrat entre l'employeur et le donneur d'ordre, que se plier aux exigences de ce dernier. Le débat entre le travailleur et ses supérieurs est ainsi réduit au caractère purement professionnel, excluant la mise en question des conditions de travail. Cette citation d'Ernst Jünger me paraît décrire parfaitement cette situation : « toute exigence de liberté apparaît ici comme une exigence de travail ». Cela veut dire que l'individu est libre à condition qu'il soit Travailleur. Pour Jünger, être Travailleur veut dire avoir part à « une nouvelle humanité vouée à la Domination par le destin ». Autrement dit, il faut que l'individu intègre mentalement pour son intérêt propre les exigences des structures dominantes, qui, avant de représenter le destin, sont surtout celles de la domination technico-commerciale. Pour que notre désir de liberté corresponde aux besoins de nos maîtres. L’idée de besogne et de développement du travail professionnel est irrationnelle du point de vue de l’intérêt personnel mais demeure un des éléments de notre culture capitaliste. Comment ne pas concevoir que l’existence d’une forme réductive de conditions de travail ne peut exister sans l’intégration mentale de cet élément ? Celui qui dit à son collègue « j’ai encore gagné ton salaire » exprime à peu près la même chose que le verset de Saint-Paul « si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus », dont Weber a écrit qu’il vaut pour chacun et sans restriction. Bibliographie: JUNGER (Ernst), Le Travailleur, Bourgois, 1989, p 100 WEBER Max, L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris, Plon, 1976, p80. Le livre La Maintenance sous traitée

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